Par Cédric Muller
« Ah, bon, il y a une équipe de baseball à Strasbourg? » est la question récurrente qui écorche les oreilles des
joueurs de baseball strasbourgeois depuis… 1974.
C’est le SUC qui, le premier va affilier une équipe auprès de la FFBSC (fédération française de baseball, softball et cricket). Cette équipe originelle remporte son 1er titre de champion de France de 2ème division en 1978, avant de se hisser à la deuxième place en 1ère division l’année suivante.
Dans les années 80, le SUC commence à se développer avec une équipe 15U. Lionel Wendling, Giorgio Carloni, Luc Linster, Jacques Ermolieff et une poignée de copains coulent, sans le savoir, les fondations d’un club qui, quatre décennies plus tard, comptera plus de sept équipes (9U, 12U, 15U, 18U, softball féminin, deux équipes séniors) inscrites en championnat et plus de 150 licenciés.
1989 est une date importante dans l’histoire du baseball strasbourgeois. Il y est alors pratiqué en UNSS, dans trois lycées du centre-ville. A Kleber, les frères Elgo et Roland Ohlenbuch (qui deviendra président des Outlaws 25 ans plus tard et l’actuel président du SUC Omnisports) fondent les STORKS. A Pontonniers, Cédric Muller et Anthony Coutin, les plus jeunes joueurs du SUC, fondent les BLUE MONKEYS, avec l’aide de joueurs néerlandais, canadiens et américains. A Saint Etienne, Wouter Van der Veen, jeune lanceur d’origine
hollandaise, devient un des principaux leaders d’une équipe de passionnés, sous la tutelle de Claude Steyer, regretté professeur d’éducation physique: Les Outlaws sont nés. Ils dominent dès le début. L’année d’après, les Outlaws connaissent une expérience qui les marquera durablement, grâce à l’engagement de Claude Steyer: Ils se rendent à Chicago où ils affrontent une équipe de High School, apprenant ainsi le baseball tel qu’il est pratiqué aux USA et, accessoirement, l’humilité.
En 1991, les Outlaws s’inscrivent à la FFBSC. Coutin et Muller quittent le SUC pour les rejoindre. L’année d’après, les Blue Monkeys et les Storks disparaissent, les joueurs ayant quitté le lycée. Certains d’entre eux rejoignent le SUC, équipe alors vieillissante, ayant abandonné sa section jeunes. Cyril Guilloux, Christel Vigneron, Roland Ohlenbuch et quelques Storks de Kleber créent alors les RED SOX, qui seront entrainés par Jeff Letter, un ancien facteur de Philadelphie devenu professeur à Strasbourg.
Les trois équipes strasbourgeoises s’affrontent alors en championnat dans des matchs souvent âpres et rugueux: Les Outlaws se forgent rapidement une réputation de joueurs très offensifs, qui pratiquent un baseball sans concession. Les trois équipes ne s’apprécient guère. Ce sont les Outlaws qui se développent le plus rapidement: la toute première équipe de softball féminine est créée en 1992 et l’équipe de 15U compte pas moins d’une trentaine de joueurs. Les victoires s’enchaînent: UNSS, Régionale, Nationale 2, la machine Outlaws est quasiment invincible: la seule défaite que les joueurs strasbourgeois connaissent est la finale de la Nationale 2. Ils la disputeront cinq fois et la perdront quatre fois (Strasbourg n’a plus jamais remporté cette
finale depuis 1978). Mais les Outlaws sont un club hors du commun: les joueurs ont la vingtaine, ils sont totalement passionnés par ce sport, dont ils font un art de vivre: le club se situe entre la famille et le gang. Beaucoup de joueurs masculins sont en couple avec les filles de l’équipe de softball. Le Movie (aujourd’hui le Legends Bar), rue de l’arc-en-ciel, est le QG des baseballeurs, où sont projetés leurs exploits sur grand écran sur fond de musique hard rock. Plusieurs d’entre eux se rendent régulièrement à Boston, Chicago, New York, Québec ou Montréal afin de cultiver leur amour du jeu. Chaque été, ils vont enseigner leur discipline dans les quartiers « difficiles » de Strasbourg ou dans des centres sociaux culturels.
En 1995, les trois équipes mettent leurs rancoeurs de coté et fusionnent sous la coupe du SUC, mais gardent le nom d’Outlaws. Strasbourg se hisse en division Nationale 1.
Faute de terrain digne de ce nom, l’équipe ne peut se maintenir en division nationale. C’est l’unique problème des Outlaws: Stade de l’Ill, de l’Elsau, terrain de rugby du CREPS, cité des chasseurs à la Roberstau, Illkirch et Geispolsheim dans les années 2000, les Outlaws sont ballottés de terrain en terrain, sans jamais avoir le leur, ce qui pose problème à chaque match disputé avec des équipes de haut niveau, qui émettent régulièrement des réclamations auprès de la FFBSC. Dépités, les Strasbourgeois rejoignent le championnat allemand en 2004, bénéficiant ainsi du terrain des Mosquitos de Kehl, en face de la piscine. Ils seront consacrés deux fois champions de Bezirksliga. En 2014, les Outlaws terminent à la première place de
Landesliga en Allemagne mais l’accès à la division supérieure leur est refusé.
En 2015, les Strasbourgeois retrouvent ainsi leur ville natale qui les accueille… avec un véritable terrain de baseball officiel, basé Boulevard Pierre Pfimlin au Wacken. C’est l’apothéose: Les Outlaws accèdent à la Nationale 2, puis à la Nationale 1 de 2016 à 2018.
Et maintenant?
2025 sera une année charnière pour le Club: Antoine Salvador, président du Club, doit faire face au départ à la retraite de Franck Holdry et Cédric Fénard, deux joueurs ayant rejoint les Outlaws au milieu des années 90 et qui coachent les équipes 12U, 15U, 18U et Senior 1 depuis plus de 10 ans. Si, les plus jeunes seront toujours formés par Christel Vigneron, Christine Koller, Olivier Goutal et Gauthier Dubaut, les 15U et 18U verront un Cédric partir à la retraite pour être remplacé par un autre, qui sort de la sienne. En effet, Cédric Muller, qui
avait ses débuts au SUC en 1987 sera le Manager des 18U et coach des 15U, accompagné de jeunes coachs parmi lesquels Thibaud Champlon, Tom Beer Bartolome et Justin Prignot. Bryan Laffeach continue d’encadrer le séniors débutants et l’équipe Sénior 1, managée par Franck Holdry depuis plus d’une dizaine d’années, va être confiée à deux de ses joueurs phares: Raphael Joussellin et Simon Mellion qui vont devoir recomposer une toute nouvelle équipe, à l’aide de très jeunes joueurs prometteurs, comme les américains Noah Gillam et Vittorio Brown, et d’une poignée de joueurs confirmés comme Kevin Niklos, Valentin Thorel, sans oublier Jorge Contreras, connu pour son redoutable coup de batte. Le défi est de taille: imiter l’équipe de softball féminine et son entraineur Julien Croix, qui viennent de remporter le titre de Championnes de Softball Fast Pitch Grand Est 2024. Face à eux, de redoutables équipes très expérimentées, comme les Cometz de Metz ou les Cardinals de Colmar, qui comptent dans leurs effectifs d’excellents joueurs, dont plusieurs tout droit venus de Cuba ou de République Dominicaine. Mais le challenge ne fait pas peur aux strasbourgeois. Ces derniers ont de la ressource. Ils le prouvent depuis longtemps.
50 ans, pour être exact.